Étape 4/6 – Göschenen > Interlaken

Ma pomme au Sustenpass (2224 m) !

Mercredi 11 septembre 2024 – Göschenen – Suisse

Lever 6h45… j’ai très bien dormi. Cette fois-ci, j’ai pu régler le chauffage pas trop fort car je n’ai pas eu à faire sécher mes affaires ! De plus, comme l’étape d’hier a été tronquée et que nous n’avons pas eu à changer d’hôtel, je ne suis pas trop mal physiquement.

Par contre, l’état d’esprit est un peu différent par rapport à ce qui était prévu pour cette journée. Tout d’abord, c’était encore une étape complètement dingue pour rallier Interlaken situé dans le Canton de Berne (100 km / 2765 m de D+) avec au programme 2 ascensions monstrueuses : le Sustenpass (2224 m) et le Grosse Scheidegg (1962 m).

Mais mais mais…

Il a fallu changer le programme à cause de vous savez quoi si vous avez lu les récits des 3 premières étapes : une météo des plus capricieuses ! En effet, il est prévu le retour de la pluie à partir du début de l’après-midi, donc pendant l’ascension du Grosse Scheidegg… Ce dernier, situé à 1962 m d’altitude n’allait pas offrir de belles conditions pour son passage avec sûrement un temps presqu’hivernal ! La veille au soir, durant le repas, tout le monde était d’accord pour ne pas avoir à subir à nouveau des conditions très détestables pour de pauvres cyclistes (voir étape 1 et étape 2).

De plus, le Grosse Scheidegg avait une certaine particularité : c’est une route touristique uniquement réservée aux… vélos ! Et aussi aux fameux bus jaunes CarPostal (là aussi, un incroyable réseau unique propre à la Suisse) mais pas du tout aux autres véhicules motorisés. Donc impossible pour notre guide Stéphan de prévoir une assistance en cas de problème. Rajouter à cela une voie très étroite et très pentue pouvant rendre la descente très dangereuse en cas de pluie, le Grosse Scheidegg allait passer à la trappe !

La terrible ascension du versant Est du Grosse Scheidegg !

C’est vraiment trop dommage, car le Grosse Scheidegg devait nous offrir l’une des plus belles ascensions des Alpes suisses et même des Alpes tout court avec une vue unique sur des glaciers et les falaises environnantes du Wetterhorn (3690 m), du Schreckhorn (4078 m) et de la fameuse face nord de l’Eiger (3967 m). Par contre, les 19 kilomètres de montée et 1346 m de D+ à 7,5% de moyenne avec plusieurs passages à plus de 10% auraient à coup sûr bien fait mal aux pattes !

Le parcours sera donc le suivant : ascension du Sustenpass et suivi de l’Itinéraire nationale à vélo n°9 appelé la Route des Lacs entre Meirigen et Interlaken.

De Göschenen à Wassen

Le départ est prévu pour 8h, je quitte ma chambre pour préparer le vélo. Au pied de l’hôtel, je constate avec soulagement que le temps est au beau fixe comme prévu, du moins pour cette matinée. Ça me rassure un peu pour l’ascension du Sustenpass qui est situé à plus de 2000 m d’altitude… mais le « mauvais » souvenir du Passo del Lucomagno est encore bien frais : il faisait un temps magnifique le matin et nous avions terminé frigorifiés en début d’après-midi ! Par contre, il fait très frais, je n’ai pas hésité à me vêtir en « long ».

Depuis l’entrée de l’hôtel, une magnifique vue sur le Dammastock (3630 m) et son glacier (le Dammagletscher). De l’autre côté se trouve le Glacier du Rhône !

Pas facile de partir à l’heure car avec un groupe de 14 personnes, il y a toujours des impondérables… c’est à 8h30 que tout le monde est enfin prêts ! Je trouve ça un peu dommage car c’est 1/2 heure de moins que nous allons perdre sur la bonne fenêtre météo prévue ce matin…

Chargement des bagages dans la remorque.
Prêts pour une nouvelle étape. Ma pomme est en jaune fluo !

Par contre, avant de nous lancer, nous disons au revoir à Tobias… qui nous quitte ! Il n’a malheureusement pas « survécu » aux mauvaises conditions météo des 2 premières étapes. Ayant pris un coup de froid, il a attrapé un mal de gorge et c’est bien malade qu’il est contraint d’abandonner le voyage (il n’a pas pu rouler la veille). Cela a été un vrai crève-cœur pour lui mais les étapes à venir n’étaient pas possible à réaliser sans avoir une bonne santé. Depuis Göschenen, il va effectuer un long retour en train jusqu’à Metzingen (près de Stuttgart) en Allemagne. Bon vent Tobias et je pense que tu auras sûrement une belle revanche à prendre une autre fois prochaine !

Je piaffe d’impatience, je pars devant sachant qu’on me rattrapera bien rapidement… bye Göschenen. L’étape débute par une… descente de 4,6 km jusqu’à Wassen, pied de l’ascension du Sustenpass. En descendant une petite partie de la Vallée de la Reuss, je constate que les infrastructures sont impressionnantes entre voies, tunnels et viaducs répartis entre l’autoroute A2, la Route principale 2 et le chemin de fer.

En quittant Göschenen, un dernier coup d’œil en arrière sur le Défilé de Schollenen que j’ai gravi hier.
J’arrive rapidement à Wassen.
Au centre de Wassen, bifurquation à droite pour attaquer le Sustenpass.

Sustenpass – 2224 m

À Wassen, on ne rigole plus, c’est le moment d’attaquer la grosse ascension du jour : le Sustenpass… et avec ses 2224 m d’altitude et avec 17,8 km à 7,5% de moyenne, c’est un sacré défi qui nous attend ! Et quand on regarde le profil ci-dessous, impossible d’avoir un seul moment de répit, il faudra être en forme et surtout être courageux…

Distance : 17,8 km
D+ : 1309 m
% moyen : 7,5%
% max : 9% sur 550 m

Je jette un coup d’œil au-dessus de Wassen… mais où peut bien se trouver l’entrée de la Vallée de Meiental ?! Je ne vois qu’une paroi rocheuse qui semble barrer le passage… Je me lance dans la première rampe de 600 m à 6,5% qui va me guider d’abord sur les hauteurs de Wassen. En me retournant, j’aperçois les membres du groupe qui attaquent le pied de l’ascension et qui vont me rejoindre sous peu… cool, je vais en profiter pour faire une série de photos souvenir de chacun avec un bel arrière-plan !

Dans la première rampe au-dessus de Wassen.
Un rocher avec un décor singulier. On reconnaît le blason du Canton d’Uri dont les armoiries traditionnelles présentent une tête de taureau (Uri veut dire taureau).
Tout le monde arrive en ordre dispersé. On commence par Jenni.
Ensuite Agustin.
Esther.
Peter.
Walter, George et Jeremias.
Ruth.
Et Mansour.

Par contre, j’ai raté Patricia et Batsirai qui était un peu retardés mais qui nous ont rattrapé peu après pour réaliser l’étape en duo, étant les plus rapides du groupe.

Après ma série de photos et un dernier coup d’œil à Wassen, je repars et découvre enfin l’entrée « secrète » de la Vallée de Meiental : deux courts tunnels (100 et 67 m) entrecoupés d’un petit pont assez aérien permettent de franchir la Meienreuss. J’adore ce type de passage un peu spectaculaire !

Une jolie vue sur Wassen…
…avant de s’engouffrer dans l’entrée secrète de la Vallée de la Meiental.
Le défilé de la Meienreuss (© Walter Schweitzer).

À la sortie du second tunnel, un lacet sur une pente assez soutenue – 7,5% sur 500 m – nous permet de voir encore quelques instants la Vallée de la Reuss puis un nouveau tunnel (80 m) suivi d’un long paravalanche (680 m) nous guide cette fois-ci plus franchement dans la Vallée de la Meienreuss. C’est assez raide – 8,5% sur 650 m – mais comme on est bien frais, ça passe pour tout le monde.

Pour ma part, je me sens très bien. Je suis un peu trop habillé mais je n’enlève pas de couche car ja sais qu’il va faire bien frais au fur et à mesure que l’on va s’élever… et vu la déclivité – 7,5% sur les 1350 mètres suivants – on va gagner rapidement de l’altitude !

Tout le monde s’organise tranquillement à trouver son rythme… le mien devait convenir à une petite partie du groupe (Esther, Peter et George) car me voilà en tête à ouvrir la route et ce durant quelques bons kilomètres… ben, ça fait drôle, je n’ai vraiment pas l’habitude de me retrouver dans ce type de situation ha ha ha !

Sous le paravalanche, le gars en jaune est votre serviteur ! (© Walter Schweitzer)
La Vallée de la Meiental commence à s’élargir… on aperçoit au fond le théâtre final du Sustenpass !
Tiens, je n’avais pas encore pris de photos de vaches suisses !

La pente fait un peu relâche en passant à 6% sur les 1350 mètres suivants. Idéal pour suivre un petit tempo tout en gardant sous la pédale car la route sera implacablement linéaire sur près de 11,5 km !

Sur la gauche, on peut apercevoir plusieurs sommets marquants dont le Fleckistock qui culmine à plus de 3000 m et qui est en partie enneigé suite aux intempéries de ces derniers jours… ça marque le fait qu’on est bien en haute montagne !

La déclivité s’accentue à nouveau à 7% mais sur seulement sur 650 m en traversant Meien (alt. 1274 m) qui sera le dernier (petit) village de la vallée. Et ce sera extraordinaire car le reste de l’ascension sera quasi sauvage…

Meien, le principal village de la Vallée de la Meienreuss.
Avec sa belle église bien campée au milieu de la vallée.

À la sortie de Meien, la pente fait à nouveau relâche à 5,5% durant 800 m. Profitons de ce replat car ce sera le dernier ! Nous avons roulé 5,9 km depuis le pied de l’ascension… il reste 11,9 km jusqu’au sommet… et la pente va désormais y flirter joyeusement avec les 8/9% !

La fatigue n’est pas encore là et nous sommes bien occupé par la vue sur le Wendenhorn et ses 3000 m que nous avons désormais en mire.

Wouahh, c’est trop chouette ! Le Wendenhorn sera notre « phare » durant une bonne partie de l’ascension (© Peter Bevan).
Un petit coucou en live de votre serviteur et « son » petit groupe ! (© Batsirai Matanhire)
De multiples cascades coulent sur l’autre versant de la vallée (© Peter Bevan).

À l’issue de ce dernier plat, je choisis de faire une petite pause « technique » et laisse filer Esther, George et Peter. J’en profite pour enlever une couche, la température étant encore bonne, le soleil étant encore présent. Mais le ciel prend des allures laiteuses… je repars sans trop tarder car comme dans le Col du Lucomagno deux jours plus tôt, ça pourrait vite tourner…

Pendant 3 km, je vais faire le yo-yo avec Ruth et Agustin qui m’ont rattrapé. Tous les autres sont devant à l’exception de Mansour et Jeremiah qui sont un peu plus loin en queue de peloton.

Je roule désormais à mon rythme et profite du spectacle qui m’est offert. Cette Vallée de Meiental est vraiment magnifique avec son fond verdoyant qui contraste avec le minéral de tous les sommets environnants culminants majestueusement à près de 3000 m.

La pente a repris désormais du poil de la bête et va tourner autour des 7,5/8% sur les 3200 mètres suivants. Ça me va toujours bien car elle est très régulière même si elle est encore « trop » linéaire à mon goût.

Petite pause et coucou à Ruth et Agustin qui n’étaient pas très loin derrière.
Le Wendenhorn (2023 m) au centre.
La route bifurque un peu vers la droite, nous offrant une vue sur d’autres sommets de la Vallée de la Meiental.

À l’approche d’une large courbe où la pente fait une légère « relâche » à 7% sur 700 m, je peux profiter d’une rare (et belle) vue sur quelques sommets du versant droit de la Vallée de Meiental avec une ouverture assez étonnante sur le Vallon de Chlialp.

Après ce petit intermède, la route repart sur la gauche. D’autres sommets à « 3000 » apparaissent… pfffff, tout n’est que grandeur ici, dans les Alpes françaises c’est plus rare de voir cela. Je suis encore un peu Ruth et Agustin sur le passage de le plus raide de cette ascension : 550 m à 9%. Il se termine au franchissement d’un petit tunnel (25 m) percé à même la roche : le Kronstollen.

Dans un virage, une vue superbe sur le Vallon de Chlialp.
Après ce petit intermède, la route repart sur la gauche. D’autres sommets à « 3000 » apparaissent…
Passage d’un petit tunnel (25 m) percé à même la roche : le Kronstollen.
Armoiries du Canton d’Uri et du village de Wassen.

Après le passage du Tunnel de Kronstollen, je laisse filer Ruth et Agustin… parce qu’à partir de ce point, je vais m’arrêter très souvent pour sortir l’appareil photo ! Et pour cause, je m’en prends plein les mirettes avec la route finale du Sustenpass qui évolue dans un décor grandiose qui s’étale du Wenderhorn (3023 m) au Vorder Sustenhorn (3318 m). Il y a aussi un impressionnant glacier, celui du Chalchtalfirn, qui s’écoule au-dessus du Sustenpass.

Après le tunnel, on distingue la route finale du Sustenpass.
Les derniers kilomètres du Sustenpass sont en lacets.
Un sublime panorama s’offre à moi !
Sommets environnants et vue sur le Sustenpass.
Le Glacier du Chalchtalfirn entre le Vorder Sustenhorn et le Sustenpitz.

Sur les 5 prochains kilomètres, la déclivité va évoluer entre 8 et 8,5%. Ben je suis en forme, je ne ressens pas trop la difficulté car c’est toujours très régulier et puis je suis bien distrait par le spectacle qui m’entoure !

Une nouvelle courbe assez large me guide vers le restaurant du Sustenbrüggli, dernier lieu habité (à la belle saison) avant le sommet. Le décor est superbe avec une vue saisissante du Wenderhorn car à 1908 m d’altitude et après 13,3 km d’ascension depuis Wassen, je suis désormais à son pied.

Dans une nouvelle courbe à droite, une vue saisissante du Wenderhorn.
Le restaurant du Sustenbrüggli (alt. 1908 m). Quel décor !

Après le restaurant du Sustenbrüggli, c’est le début du bouquet final du Sustenpass avec 4,5 km jusqu’au sommet. Je vais avoir droit à 2 magnifiques lacets qui vont me permettre de profiter de points de vue fabuleux sur toute la Vallée de Meiental.

La route est ouverte pour le final !
À proximité du restaurant du Sustenbrüggli, les méandres du Sustlibach s’écoulent vers la Meienreuss.
Sur la gauche, le Glacier du Chalchtalfirn entre le Vorder Sustenhorn et le Sustenpitz (la photo ne rend hélas pas justice à l’immensité des lieux).

J’arrive à l’entrée du premier lacet… il passera comme une lettre à la poste car la pente s’est faite plus douce en passant à 6,5% sur 950 m. Il faudra remettre un petit coup de collier dans le second lacet avec une déclivité à 7,5% sur 1250 m. Là aussi, je n’ai pas trop pêché car je savais aussi que c’était le dernier effort à fournir avant d’atteindre le sommet.

Le sommet qu’on atteint par… un tunnel ! Il faut traverser le beau Scheiteltunnel long de 156 m et tout plat, pour franchir le Sustenpass à l’altitude de 2224 m.

Je vais bientôt attaquer les 2 lacets du final… les 2 ponts superposés sont superbes.
Depuis le premier pont, vue sur le second.
Le Vorder Sustenhorn (3318 m) et le Sustenpitz (2931 m).
Dans le premier lacet.
Petit coup d’œil vers le fond de la vallée… incroyable !
Depuis le second pont, vue sur le premier (© Peter Bevan).
Dans le second lacet un peu plus haut, il y a un nouveau tunnel percé dans la roche.
De l’autre côté de la vallée, des sommets sauvages et qui semblent inaccessibles !
Vu sur le premier lacet.
J’attaque le second lacet.
Le second tunnel, celui-là n’a pas de nom !
Vue vertigineuse sur le second lacet… quand on voit la route en contrebas de la vallée !
À l’entrée du Scheiteltunnel, je suis quasiment arrivé au Sustenpass.
Traversée du Scheiteltunnel (156 m), à l’aspect nickel et bien éclairé !
Ma pomme au Sustenpass (2224 m) !

Me voilà enfin au sommet du Sustenpass. À 2224 m, c’est un magnifique « 2000 » que je peux ajouter à ma collection. Je suis très heureux d’en avoir pu bien profiter car c’est le dernier haut sommet de ce voyage.

Pour info, c’est la version « tunnel » que j’ai franchi (reconnu par le Club des Cent Cols). Je n’ai su qu’après le voyage que le « vrai » col – le Sustenpasshöhe – était situé un peu plus haut à 2259 m. Et il est accessible via une voie d’accès asphaltée qui mène à une auberge-hôtel : le Berggasthaus Sustenpass Hospiz. Par contre, il faut se farcir en supplément une jolie rampe de 300 m à 10,5% ! Bon, dans tous les cas, je n’aurais pas eu le temps de m’y rendre parce que ça commençait à se couvrir et je n’avais pas envie de subir une éventuelle averse… ou le courage si le programme avait été respecté car il y aurait eu le terrible Grosse Scheidegg à venir.

Avant de repartir, je fais une petite pause pour profiter du nouveau décor que j’ai découvert après avoir franchi le tunnel. C’est assez austère et sauvage comme j’aime. Même s’il y a un restaurant et le Berggasthaus Sustenpass Hospiz juste au-dessus, il sont bien intégrés dans le paysage et il n’y a pas de pylônes ou autres installations qui peuvent dénaturer le paysage.

J’ai été un peu étonné par la suite par cette incroyable route construite entre 1938 et 1945, qui n’a qu’un seul intérêt : celui d’être touristique (étant doublé un peu plus au Sud par le Grimselpass). Et quand je vais découvrir un tout peu plus tard le versant Ouest qui m’a semblé encore plus incroyable (27,7 km / D+ 1598 m depuis Innertkirchen) avec ses 13 tunnels ! Mais je ne vais pas m’en plaindre car elle comble sans aucun doute le bonheur de plus d’un cycliste !

Vue sur le panorama Ouest.
Vue du côté Est vers le tunnel. Le « vrai » col – Sustenpasshöhe, 2259 m – est situé plus haut sur la droite.
Vue du côté Nord.
Le Sustenspitz vu du côté Sud.
Photo souvenir de Esther, Walter, Peter, George et Jenni, ayant franchi le Sustenpass un peu plus tôt (© Walter Schweitzer).

Entre le Sustenpass et Meiringen

Je repars sans trop tarder… le soleil s’est désormais derrière des nuages qui commencent à être bien nombreux. La descente du versant Ouest jusqu’à Innertkirchen va être longue… très longue avec près de… 27,7 km !

Je démarre à peine que je m’arrête aussitôt dans le premier lacet : un superbe panorama sur le Sustenhorn (3316 m) et son glacier avec un petit lac à son pied, le Steisee, m’oblige à l’admirer et à prendre obligatoirement une photo !

1 lacet plus bas, la vue de dingue côté Sud-Ouest sur le Sustenhorn (3316 m) et son glacier !

La descente sera fantastique au sein de la Vallée de Gadmertal. Ce sera seulement la seconde du voyage que je ferais au sec. Au début de la descente, je vais enchaîner une succession de beaux lacets tout en traversant de nombreux et courts tunnels taillés dans la roche dont l’un est même chevauché par une cascade ! Le tout, bien sûr, sur une route à l’asphalte parfait.

La Vallée de Gadmertal.
Au premier plan, l’incroyable route avec ses multiples tunnels. En arrière-plan, l’impressionnante barrière rocheuse du Gadmerflüö qui culmine à près de 3000 m.

Je prends mon temps pour descendre pour profiter de l’incroyable décor. Je croise notre guide Stéphan qui a fait un petit arrêt photo souvenir du Sustenhorn. Peu après, Mansour et Jeremias m’ont rattrapé et dépassé à cette occasion, je me retrouve donc en dernière position.

Pas grave, je profite bien de l’instant car la météo prévue pour la suite du voyage n’est pas des plus optimistes… Je franchis sans trop m’en rendre compte un col référencé par le Club des Cent Cols : le Löïbodden situé à 1607 m d’altitude. Oui, le nom de ce col comporte trois trémas !

De gauche à droite, vue sur le Sustenspitz, le Vorder Sustenhorn, le Sustenhorn et le glacier Steingletscher.
Vue sur la Vallée de Gadmertal depuis le Col de Löïbodden (1607 m).
Un peu plus bas, vue sur la cascade de Treichigraben.
Vue sur l’Engelhörner (littéralement : « cornes d’ange »), derrière se trouve la vallée qui mène au Grosse Scheidegg.

À Gadmen à environ 1200 m d’altitude, c’est un petit retour à la civilisation après 15,5 km de décor sauvage depuis le Sustenpass. Mais en douceur et en beauté : ce sont par ci et par là, de jolis petits villages composés de chalets entourés de prés verdoyants qui composent les emblématiques cartes postales suisses ! À ce moment, je me promets de pouvoir revenir un jour grimper ce versant du Sustenpass sous un beau ciel bleu pour pouvoir prendre de chouettes photos !

J’arrive au terme de cette longue descente de 27,7 km, je crois que c’est la plus longue que j’ai faite jusqu’à aujourd’hui. Je traverse Innertkirchen, un joli village situé au centre d’une étonnante cuvette tapissée de prés verdoyants avec la rivière de l’Aare qui coule au milieu.

À un carrefour, à gauche, le Grimselpass, un autre col mythique (2265 m)… à droite, ce sera ma route à suivre en direction de Meiringen.

Mais avant de rejoindre ce dernier, je vais franchir le Col du Kirchet (710 m). Il faut remettre en route les jambes pour cette courte ascension de 1,7 km. Il y a un bon petit D+ avec 120 m à 7% de moyenne mais 3 lacets permettent de passer l’obstacle sans trop souffrir.

Dans un lacet, je fais une pause photo sur la Vallée de l’Haslital. Je me suis arrêté à côté d’une espèce de bar-boutique, il y a du monde… je ne l’ai appris que par la suite : c’est l’entrée Est de l’Aareschlucht, une visite touristique des Gorges de l’Aare. Mais je n’en aurais pas du tout profité car la vue était bouchée par le bâtiment d’accueil (c’est une visite payante mais elle doit valoir le coup !).

Entre Innertkirchen et Meiringen, un petit col intermédiaire : le Col du Kirchet (710 m)
Dans la montée du Col du Kirchet, vue sur Innertkirchen et la Vallée de l’Haslital qui mène au Grimselpass.

Je reprends ma route et franchis peu après le Col du Kirchet. Je vole une photo, je ne fais pas très attention… c’est ici que se trouve l’accès de l’ascension du Grosse Scheidegg (1962 m). Quel dommage de ne pas avoir pu la faire même si c’était un sacré morceau à avaler avec 19 km à 7,5% de moyenne.

Il faut savoir que sur chaque versant, une grande partie de la route est réservée aux cyclistes et piétons à l’exception des cars postaux (en Suisse, ces fameux bus jaune transportent aussi des voyageurs) et des résidents. Donc il n’y a quasiment pas de circulation automobile !

Col du Kirchet – 710 m.

Je vous invite à consulter le profil de cette montée mais aussi la page de Cycling Challenge pour avoir un aperçu de l’une des plus belles ascensions des Alpes. Bien sûr, comme pour le Sustenpass, je me promets d’y revenir…

Dans l’ascension du Grosse Scheidegg, on peut admirer l’impressionnante face Nord de l’Eiger (photo Cycling Challenge).
Le profil monstrueux du Grosse Scheidegg !

Je bascule sur le versant opposé du Col du Kirchet. Ce dernier n’est pas très long et j’arrive rapidement à l’entrée de Meiringen. Je retrouve une grande partie du groupe qui en termine avec une pause initiée par notre guide Stéphan.

Mais le temps de manger 2 ou 3 choses (Stéphan a eu la très bonne idée de proposer des petites barres de chocolat suisse, miam j’adore !) et de refaire le niveau des bidons, tout le monde est reparti… bon, je vais terminer à coup sûr l’étape en solo !

Pause à Meiringen (© Peter Bevan).

Entre Meiringen et Interlaken

Je suis désormais dans le Canton de Berne. Il reste environ 30 km pour en terminer avec cette étape. Je repars en suivant ma trace GPS qui me fait passer par le centre de Meiringen. J’aperçois du coin de l’œil une statue de Sherlock Holmes mais je ne prends pas le temps d’observer cette curiosité. Le ciel est devenu assez chargé et craignant une averse prochaine, je préfère avancer…

Combat entre Holmes et Moriarty dans Le Dernier problème, illustration de Sidney Paget.

Pourtant, après avoir fait quelques recherches un peu plus tard, j’ai appris que Meiringen abritait un musée consacré à Sherlock Holmes, célèbre héros romanesque créé par Arthur Conan Doyle. En effet, c’est dans les chutes du Reichenbach situées à quelques encablures (que j’aurai pu même apercevoir depuis le lieu de la pause !), que ce dernier disparaît après s’être battu avec son ennemi juré, le professeur Moriarty.

Dans le centre de Meiringen, je bifurque sur une piste cyclable. En fait, ce sont 2 itinéraires cyclables nationaux communs, les n°8 et n°9, qui vont me permettre de rouler tranquillement jusqu’à Interlaken.

Changement de décor, je suis désormais dans le Canton de Berne. Je vais remonter une très large vallée, celle de l’Aare. Cette rivière, longue de 288 km va traverser 2 grands lacs : le Brienzersee et le Thunersee. Interlaken se trouve juste entre ces deux lacs.

Durant cette dernière partie d’étape, je ne vais pas m’ennuyer et découvrir des trucs bien sympas malgré la météo devenue bien grisâtre.

C’est d’abord tout plat durant 11 km, ce qui me laisse à penser que ça va être assez facile de rallier Interlaken mais j’allais avoir de jolies petites surprises.

Peu après Meiringen, la voie cyclable longe des pistes d’aviation gardée par des barrières en barbelé et quelques postes de contrôle… c’est celle de l’Aérodrome militaire de Meiringen. Oui, la Suisse bien que neutre, possède une armée pour se défendre ! À noter que les avions utilisés sont des F/A-18 Hornet… américains !

La piste cyclable va longer les pistes de l’Aérodrome militaire de Meiringen.

Un peu plus loin, à défaut d’avoir raté la vue sur la cascade de Reichenbach, je passe à proximité d’une autre cascade, celle d’Oltschibach. Il y a une route qui invite à s’y approcher mais je décline l’offre, j’ai déjà dans l’idée que je reviendrais dans le coin pour des vacances estivales et j’aurais tout le loisir de la visiter…

La cascade d’Oltschibach.

Je rate une bifurcation (la trace GPS a été tracée un peu dans l’urgence…) et je me retrouve en direction de Brienz. Mais avant de revenir sur mes pas, j’ai l’occasion d’avoir un bel aperçu sur le Haupkanal qui guide l’Aare vers le Brienzersee (Lac de Brienz en français).

Le Haupkanal en direction du Brienzersee.

Peu après, je me retrouve à proximité du Brienzersee dont j’aperçois les eaux incroyablement turquoises. De l’autre côté du lac, je peux voir Brienz. Le lac est entouré de montagnes culminant à près de 2000 m. Dommage que le ciel est très gris, la vue serait encore plus belle.

La voie cyclable va emprunter la rive Sud du Brienzersee mais elle ne va pas longer le bord mais plutôt ses côtes… qui sont bien escarpées ! Ce sera un enchaînement de montagnes russes durant une douzaine de kilomètres. J’aurais zappé le Grosse Scheidegg mais cette partie m’aura offert un petit rattrapage avec près de 300 m de D+ et des passages atteignants et dépassants souvent les 10% !

Brienzersee. De l’autre côté du lac se trouve Brienz. Un peu sur la droite, le Brienzer Rothorn (alt. 2349 m).
Une bonne rampe (13%) pour contourner la rive Sud du Brienzersee.

Je vais passer par un lieu étonnant et magnifique : les chutes de Giessbachfäller. À ses pieds se trouve un superbe hôtel historique, le Grandhotel Giessbach (construit en 1875 et sauvé de la destruction en 1983). Ce dernier et les chutes de Giessbachfäller sont accessibles éventuellement en voiture (il faut acheter un ticket, 15 CHF, depuis 2025) mais aussi par bateau suivi d’un funiculaire ! Voir ce site…

Dans une descente en direction des chutes de Giessbachfäller, le GPS perd complètement son sens de l’orientation et je me retrouve au pied du Grandhotel Giessbach. Comme c’est une impasse, il me faut remonter une abominable rampe. Je découvre que l’itinéraire cyclable n°8/9 va devenir gravel durant 800 m environ !

Je suis d’abord un sentier forestier et débouche sur un passage incroyable : un pont enjambant les chutes de Giessbachfäller ! Je vous laisse les admirer en vidéo ci-dessous…

À l’entrée de la propriété du Grandhotel Giessbach.
Le Grandhotel Giessbach (© Peter Bevan).
Grandhotel Giessbach et Giessbachfäller.
Photo souvenir du groupe passé un peu plus tôt au pied des Giessbachfäller… de gauche à droite, Agustin, Peter, Esther, Jeremiah, Jenny, Mansour, Ruth, Peter et George (© Peter Bevan).

Après cet arrêt pour admirer les incroyables chutes de Giessbachfäller, je reprends ma progression sur le passage gravel. J’essaie de bien équilibrer le vélo pour éviter une éventuelle crevaison. Je fais attention au panneau qui m’avertit aussi de la possibilité de chuter dans les eaux du Brienzersee que je ne vois pas pour l’instant car je suis dans un bon couvercle forestier.

Partie gravel d’environ 800 m après les Giessbachfäller.

Je retrouve enfin l’asphalte. Je vais enchaîner avec des montées et des descentes, parfois abruptes (plus de 10%), sur une route généralement bien goudronnée mais assez étroite. Il faut surtout faire attention dans les descentes en croisant les cyclistes qui montent dans l’autre sens parfois en zigzaguant.

Il n’y a quasiment pas de véhicules car c’est un coin assez sauvage avec quelques chalets au charmant style rustique. Quelques trouées permettent de voir le Brienzersee. Il faut savoir que sur les rives escarpées de ce lac, que l’Autoroute A8 passe sous mes roues à l’aide de plusieurs tunnels.

Séance montagnes russes sur la rive Sud du Brienzersee.

Je passe à proximité d’Iseltwald, un charmant village situé sur les bords du Brienzersee. La vue est magnifique avec le Château de Seeburg qui se trouve sur une presqu’île. Il y a la Riviera suisse du côté du Lac Léman mais celle-là est tout aussi sympa !

Iseltwald.
Panorama sur Iseltwald et le Brienzersee sous le regard de l’Augstmatthorn (alt. 2137 m).
À la sortie d’Iseltwald.

La série de montagnes russes s’achève peu avant Bönigen. Cette fois-ci la voie verte longe bien le bord du lac. C’est tout plat, ça fait du bien car je sens que ma barre d’énergie est un peu entamée. Le parcours passe par le port de Bönigen. Le DS Lötschberg, un bateau avec roue à aube datant de 1914 est à quai. Mais ce navire historique est encore en fonction car il dessert les différents pontons du Brienzersee dont le fameux Grandhotel Giessbach vu plus tôt.

J’arrive peu de temps après à Interlaken. Je ne connaissais pas du tout… quelle ville surprenante quand vous arrivez par l’avenue principale bordée d’Hôtels… 4 étoiles ! Il y a énormément de touristes étrangers… c’est un drôle de retour à la civilisation lorsque vous arrivez du Sustenpass !

Le temps devient de plus en plus maussade. Les sommets environnants sont dans les nuages et il est bien dommage de ne pas pouvoir profiter de la vue emblématique sur le Jungfrau !

Interlaken. Au centre, malheureusement dans les nuages, le Jungfrau (alt. 4158 m).

Voilà une étape qui se termine avec un bon petit bilan comptable : 88 km et 1772 m de D+ mais tout de même bien loin de l’objectif initial (100 km / 2765 m de D+).

Par contre, ma trace GPS, ayant été modifiée un peu l’arrache, ne me guide pas exactement à l’hôtel. Je perds un peu de temps à m’y rendre mais fini par enfin trouver la bonne adresse. Je retrouve Stéphan sur un parking situé à côté de l’hôtel… où une drôle de surprise attendait tous les participants : il a fallu démonter en partie tous les vélos pour pouvoir les remiser dans la remorque ! C’est que l’hôtel n’avait pas de lieu de stockage à proposer pour les vélos ! Bon, on va dire que ça fait partie des aléas du voyage…

Après avoir récupéré mon bagage, je vais à l’hôtel prendre possession de ma chambre. Mais avant cela, je vais pouvoir enfin manger… c’est qu’il est prêt de 15h30 et je commençais à avoir vraiment faim ! Je retrouve ainsi tout le groupe dans une pièce aménagée pour les petits repas et je peux enfin pique-niquer.

Après cela, je monte à ma chambre. Elle est petite mais confortable. L’hôtel – le Harder-Minerva – est sympa avec un charme à l’ancienne. Une bonne douche puis comme il n’est pas trop tard, je vais profiter d’une bonne récupération. Mais je ne peux pas profiter de ma petite terrasse, c’est que la pluie s’est mise désormais à tomber. Ouf, 45 minutes de plus et je terminais trempé !

Vers 18h, je décide d’aller faire un petit tour pour découvrir Interlaken qui avait l’air d’être très sympa lorsque je suis arrivé un peu plus tôt. Il ne pleut mais pas trop fort et il ne fait pas trop froid. Je rencontre Peter en bas de l’hôtel qui avait eu la même idée. Originaire de Perth en Écosse, c’est l’occasion de faire un peu plus connaissance malgré la barrière de la langue… mais même avec mon abominable « franglais », on est arrivé à bien s’entendre pendant la balade. Voici un florilège de photos d’Interlaken…

Après un bon petit tour, Peter et moi rentrons tranquillement à l’hôtel. Le repas est prévu pour une fois non pas à l’hôtel mais dans un restaurant situé à quelques encablures. Je n’ai pas cédé aux spécialités suisses bien appétissantes comme les Rösti, pas très digestes à mon avis pour des voyageurs cyclistes ! Je me suis rabattu sur un « sérieux » plat de pâtes mais avec quand même un petit plaisir : une bonne bière locale.

Une soirée bien sympa au restaurant.
Une bonne bière pour fêter finalement cette belle journée.

À la fin du repas, notre guide Stéphan nous fait un petit brief pour la 5e étape prévue le lendemain. Après celles de ces 2 derniers jours, l’étape sera à nouveau modifiée au niveau de l’itinéraire à cause d’une météo, une fois de plus, peu enthousiasmante ! Décidément, cette traversée des Alpes suisses ne se déroule pas comme prévu…

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