Alpes – Cluses / Col de Pierre Carrée

1er janvier 2019, lendemain de réveillon, je sommeille en début d’après-midi devant mon ordinateur et tente de réfléchir à quelques objectifs pour la nouvelle saison… j’ai bien envie de me refaire un week-end dans les Alpes comme en 2018… tiens, il y a un moyen de se faire plaisir fin mai avec le week-end de l’ascension qui s’étalerait sur 4 jours ! Cela m’offrirait l’opportunité de faire pas mal d’ascensions… je choisis rapidement Cluses en Haute-Savoie comme camp de base car il y a un moment que je voulais faire le Col de la Ramaz. Et quelles sont les autres ascensions autour que j’aimerais bien faire ? La liste s’allonge vite : les Cols de Pierre Carré, de la Colombière, de Joux Plane, de la Joux Verte, de Solaison… génial, je vais me régaler ! Mon stage « Alpes4ever » sera une réussite. Au total, ce sera près de 300 km et 7800 m de D+ en 5 sorties avec une météo presque parfaite !


Vendredi 31 mai 2019 – 58 km / D+ 1371 m / 3h33

Lever tranquille à 8h afin de profiter à fond d’un sommeil réparateur et puis l’avantage d’être à Cluses, c’est que je peux démarrer plus rapidement mes sorties. Aujourd’hui, c’est un jour particulier car j’ai décidé de réaliser non pas une mais 2 sorties ! Avec un programme de ouf en prime : Col de Pierre Carrée – plus haut col routier de Haute-Savoie à 1844 m d’altitude assorti d’un D+ de 1371 m pour la première, puis Col de Romme – un pas facile du tout – suivi d’un enchaînement avec le final du Col de la Colombière pour la seconde !

Autant vous dire que je flippais mais le challenge m’intéressait. J’avais déjà fait un petit truc de ce genre en 2010 (ça remonte) avec 2 versants du Ballon d’Alsace dans la même journée mais la difficulté était beaucoup moindre. Je me posais beaucoup de questions : comment allais-je encaisser le gros dénivelé positif prévu ce jour, aurais-je assez de jus pour la sortie de cet après-midi sachant que le final du Col de la Colombière est un des plus difficiles des Alpes, n’allais-je pas me carboniser pour les autres sorties prévues demain et après-demain, crampes et coups de moins bien à venir ?

Au départ, j’avais prévue cette sortie d’une seule traite mais ça m’a fait un peu peur et j’ai donc sorti un atout pour pouvoir enchaîner ces trois ascensions : faire donc 2 sorties puisque je devais de toute façon passer par Cluses après le Col de Pierre Carrée et les couper par un bon repas accompagné d’un mini-repos au chalet !

9h15, allez, c’est parti pour la première ascension de la journée avec le Col de Pierre Carrée.

J’ai réalisé un gros reportage photo, n’hésitez pas à les regarder en mode diaporama en haute définition !

Col de Chatillon > Col de Pierre Carrée

Il existe plusieurs versants pour cette ascension du Col de Pierre Carrée qui le plus haut col routier de Haute-Savoie avec ses 1844 m d’altitude et qui est pourtant un col étonnamment méconnu :

  • un au départ de Balme, c’est le versant officiel mais le plus dur avec près de 21 km et un D+ de 1349 m à 6,5%.
  • un au départ de Cluses ou de Taninges puis qu’il faudra d’abord grimper le marche-pied qui est le Col de Chatillon, moins difficile mais plus long avec 27,7 km (depuis Cluses) et un D+ de 1371 m à 5,5%.
  • un au départ de Flaine, c’est le versant opposé avec 3,9 km à 7%. Vous noterez qu’il y a comme un malentendu avec ces derniers chiffres… en voici la raison : Flaine est une station isolée au sein du Massif de Faucigny et le Col de Pierre Carrée mène donc à une impasse ! C’est ce qui explique ce petit manque de notoriété.

Dans tous les cas, le Col de Pierre Carrée présente un beau profil qui mérite de s’y attarder et j’aime les montées un peu méconnues. Par contre, afin de préserver quelques forces pour l’après-midi, je choisis le versant partant de Cluses, certes plus long mais plus facile dans sa première partie. Et mon choix allait être encore bien meilleur par la suite car j’allais beaucoup mieux en profiter au niveau du panorama.

Une très longue ascension…

En partant du Camping de la Corbaz à Cluses, je n’ai quelques hectomètres pour m’échauffer car je débute assez rapidement l’ascension avec d’abord le Col de Chatillon qui va me servir de marche-pied. Comme je l’avais déjà constaté la veille, ce col est très fréquenté, il y a aussi des doubles-voies dans ce versant. Je me fais tout petit et essaie de bien me tenir à droite. Ce n’est pas facile car les bords de la route comporte beaucoup de nids de poule et je constaterais tout au long de mon séjour que l’entretien des routes n’est, hélas, pas une grande priorité dans le coin ! Les pistes cyclables sont quasi inexistantes, étonnant pour une région qui comporte une partie de la Route des Grandes Alpes et des cols de légendes. Oui, et heureusement, l’effet Tour de France permet d’entretenir certaines parties des cols mais c’est à peu près tout.

Ce versant du Col de Chatillon n’est pas trop dur : 5 km à 5% de moyenne, les 1900 premiers mètres sont les plus soutenus avec 6%. Ensuite, cela devient plus roulant. Je suis tout de même récompensé par un beau panorama sur Cluses et la Chaîne du Bargy en arrière-plan. Ma prudence et surtout une grosse économie en prévision des efforts prévus pour la journée me fait un peu traîner mais finalement arriver au sommet du Col du Chatillon à 741 m d’altitude et pour la seconde fois en 2 jours.

Je débute par l’ascension du Col de Chatillon.
Cette ascension offre un chouette panorama sur Cluses avec la Chaîne du Bargy en toile de fond.
Col de Chatillon, déjà pas mal de voiture en ce début de matinée !

Au Col de Chatillon, j’emprunte immédiatement la D6 qui passe discrètement la jolie chapelle. La route va me mener indirectement à Arâches (que l’on peut rejoindre directement depuis l’ascension qui débute à Balme). J’ai réalisé une bonne pioche, très peu de circulation, pas mal de beaux points de vue sur Cluses, les Chaînes du Bargy/des Aravis, le Col de Romme que je vais grimper cet après-midi et sur les nouveaux sommets enneigés du Massif de Faucigny aux alentours du Col de Pierre Carrée. La pente est agréable avec un court passage maxi à 6,5%, ça descend même à partir de St-Sigismond. Bref, une route très bucolique où je prends un énorme plaisir à profiter du moment et où je n’ai pas à fournir trop d’efforts.

Les sommets se dévoilent un peu plus au-dessus de Châtillon-sur-Cluses.
Château de Châtillon-sur-Cluses (détruit en 1589).
Objectif prévu cet après-midi…
Un autre panorama sur Cluses.
J’aperçois nettement l’ascension du Col de Romme prévue cet après-midi.
Partie facile à partir de St-Sigismond.
À la sortie de St-Sigismond, belle vue en jetant un coup d’œil en arrière.
Église de St-Sigismond.
Je découvre de nouveaux sommets. Chaîne des Aravis à droite, Massif du Faucigny à gauche.
Côté Aravis, on distingue nettement le Col de Romme qui n’est pourtant pas reconnu par le Club des Cents Cols… étonnant !
Passage tranquille à la Frasse.
Fin de la partie facile à Arâches.

Une dernière descente me dépose à Arâches, c’est la fin des vacances et il va falloir reprendre le boulot. Et il en reste pas mal car je n’ai réalisé jusque là que la moitié de l’ascension. Juqu’aux Carroz, je me retrouve sur la D106, une large route mais la circulation est assez tranquille. La pente aussi, sur 2,9 km, elle n’excède pas les 6%.

Je traverse les Carroz, un village qui s’est transformé en station de tourisme été/hiver. Il y a des travaux qui me font dévier du tracé traditionnel où je devais bénéficier d’un replat et me voilà à grimper une rude pente qui file vers le haut de la station puis à redescendre sur la D106 à sa sortie. Du dénivelé supplémentaire pas prévu au programme !

Un beau lacet en direction des Carroz.
Un autre sommet, cette fois-ci en provenance du Massif du Chablais. Derrière celui-ci se trouve le Col de la Ramaz que j’ai grimpé la veille.
Entre Arâches et les Carroz, vue d’un sommet encore enneigé de la Chaîne des Aravis.
Les Carroz, village-station à 1114 m d’altitude.

Je me retrouve donc au-dessus d’un lacet et doit me coltiner sans transition une pente à 8%. Je rentre un peu les épaules, tique un peu quand je m’aperçois qu’il reste encore 10 km jusqu’au Col de Pierre Carrée mais heureusement le passage le plus dur de cette ascension décline au bout de 500 m. Une jolie petite série de lacets assez roulants – 1,7 km à 6% – me guide vers l’intérieur des montagnes et le Vallon du Torrent de l’Épine.

À la sortie des Carroz, il reste encore du chemin !
Non, non, ce n’est pas LE COL !
Chaîne des Aravis de l’autre côté de la Vallée de l’Arve.
En se retournant, on aperçoit encore Cluses devenue toute minuscule.

C’est une jolie surprise, la Vallée de l’Arve disparaît dans mon dos et je ne m’attendais pas à pénétrer dans le Massif de Faucigny. J’adore, le décor est devenu plus naturel et je ne croiserais quasiment personne jusqu’au sommet !

Au fond du Vallon du Torrent de l’Épine, j’aperçois la route du col mais je ne sais pas du tout où se trouve le sommet, c’est tout le charme de grimper des ascensions inédites avec son lot de découvertes et de surprises.

La route devient rectiligne sur près de 2 km, c’est long lorsque la déclivité propose un joli 7/7,5% mais elle a l’avantage d’être régulière me permettant d’adopter un rythme tranquille. J’oubliais, le temps est au beau fixe et c’est merveilleux.

J’arrive aux Carroz 1500 où démarre 2 télésièges. C’est aussi le début d’une nouvelle série de 8 beaux lacets sur 2,3 km à 7% toujours très réguliers et assez courts. Cela me va bien, c’est un pourcentage qui me convient. J’ai veillé à boire régulièrement, à prendre mon petit gel énergie à mi-parcours (voir explications ici) et le fait de rouler « en-dedans » pour me préserver en prévision de cet après-midi font que je me sens en bonne forme, les jambes moulinent correctement, je sais déjà que tout se passera bien jusqu’au sommet.

Nouveau décor en s’enfonçant dans le Vallon de l’Épine.
Les Carroz 1500.
Les Carroz 1500 où débute une belle série de lacets.
Des virages larges et plats, idéals pour se relâcher quelques secondes.
La route flirte avec les pistes de skis.

À l’approche du Paravalanche de Corbalanche que j’avais déjà aperçu depuis mon entrée dans le Vallon du Torrent de l’Épine, la pente est moins soutenue avec environ 800 m à 6,5%. On dirait un peu le remake de ma sortie d’hier avec le passage des paravalanches franchis hier dans le Col de la Ramaz, la forte déclivité en moins.

J’adore le paysage qui se dessine avec les flancs de la Pointe de Véret encore bien enneigés. Il y a aussi quelques petits murs de neige sur le bord de la route dans ce final, c’est pour cela que j’ai placé ce week-end fin mai pour pouvoir profiter de ce décor particulier de la montagne que l’on ne trouve pas en été.

À la sortie du paravalanche, la route se faufile tranquillement – 1 km à 6% – le long d’une paroi rocheuse puis une longue boucle me mène à l’Auberge de Vernant où je vais attaquer la rampe finale.

J’arrive près du paravalanche. Derrière, les flancs de la Pointe de Véret encore bien enneigés.
Paravalanche de Corbalanche.
Tout en bas, les Carroz 1500.
Les lacets que je viens de grimper.
Un beau décor avec cette neige encore bien présente.
L’Auberge de Vernant. Je vais attaquer la rampe finale.

Le final présente un long bout droit assez démoralisant à première vue mais finalement pas trop dur avec 1,3 km avec une pente régulière à 7%. Pas de circulation, il y a juste un jeune cyclo qui me double rapidement grâce à la fougue de sa jeunesse. Je suis donc presque seul au monde, le pied dans cet endroit qui me plaît beaucoup.

Un lacet en mode panoramique m’offre une très belle vue sur l’ensemble du final. À la sortie de ce dernier, et bien, il n’y a quasiment plus rien à faire avec 350 m sur une légère pente à 3,5% pour atteindre le Col de Pierre Carrée à 1844 m d’altitude. Ça y est, j’ai accroché à mon tableau de chasse, le plus haut col routier de Haute-Savoie !

Une rampe bien droite mais pas trop méchante avec une pente à 7%.
Panorama sur le final avec la Pointe de Corbalanche (à gauche) et la Tête du Pré des Saix (au milieu).
Replat de 350 m avant l’arrivée au col.
Col de Pierre Carrée – 1844 m.
C’est le plus haut col routier de Haute-Savoie.

Au sommet, pas de pierre carrée façon monolithe de 2011, l’Odyssée de l’espace, comme je l’ai imaginée il y a quelques années. Le nom reste très mystérieux, par la présence de l’imposant poste du 27e Bataillon de chasseurs alpins, on l’a attribué à celui de l’un de ceux qui l’ont occupé, mais ce n’est qu’une légende.

L’autre versant bascule vers Flaine que je peux apercevoir. Je serais tenté d’aller y faire un tour pour découvrir cette station isolée au fond d’une cuvette bordée par les belles pentes immaculées de l’Aup de Véran (2437 m) et de la Croix de Fer (2337 m) mais les efforts à prévoir pour cet après-midi me poussent à être raisonnable et à reporter à une autre fois ce projet.

Je me repose quelques minutes pour profiter du lieu, j’avale une pâte de fruits et je me lance dans la descente en retournant vers Cluses.

De l’autre côté du col se trouve la Station de Flaine.
Le poste de montagne du 27e Bataillon des chasseurs alpins occupe les lieux.

Par contre, le retour sera un peu différent : à Arâches, j’ai pris le chemin vers Balme afin de découvrir ce versant. J’ai pu constaté que ça monte fort de ce côté – content de ne le faire qu’en descente – par contre, la vue est beaucoup plus bouchée car elle se déroule en grande partie sous un couvert forestier. Il y a tout de même un petit passage spectaculaire avec la route à flanc de montagne au-dessus de Balme et qui permet de jeter un beau coup d’œil à la Vallée de l’Arve. Si je peux grimper une prochaine fois le Col de Pierre Carrée, ce sera sûrement par ce versant qui présente un sacré défi sportif.

Route à flanc de montagne dans le versant de la Balme.
Ce versant est plus dur mais offre peu de points de vue.

Dans la descente, je peux encore apercevoir le Col de Romme prévu au programme de cet après-midi et surtout constater qu’une voiture est en train de descendre la première rampe que je distingue nettement sur le versant opposé de la vallée. C’est bon signe car la route d’accès était signalée comme barrée sur le site Inforoute74… j’en reparlerai sur mon prochain article.

J’y serais dans quelques heures…
Une des seules belles vues que l’on peut avoir au-dessus de la Balme.
Vallée de l’Arve.
La première rampe au départ de la Balme.

Fin de la descente à Balme, il fait sacrément chaud au fond de la vallée. Heureusement, je n’ai que 5 petits kilomètres pour rallier mon chalet. Il est déjà 13h passé quand je peux m’enfourner une belle pastabox bien calorique ! Je repense à cette super sortie avec 58 km et 1371 m de D+… d’habitude je me serais bien contenté de celle-ci pour la journée mais il me fallait penser déjà à la suite avec le Col de Romme suivi du Col de la Colombière ! L’idée est un peu folle, j’ai pas mal de doute mais la caisse a bien tenu ce matin, on va voir si je vais réussir ce défi…

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