Alpes / Embrun – Col Agnel

Au cours de la deuxième quinzaine d’août 2019, j’ai passé mes vacances à Embrun dans le département des Hautes-Alpes. J’y ai déjà séjourné en 2005 et j’avais eu l’occasion de grimper mes premiers grands cols comme ceux de Vars et d’Izoard. Au bord du Lac de Serre-Ponçon, j’avais gardé le souvenir d’une belle météo et d’ascensions mémorables.

J’avais préparé une quinzaine de parcours me permettant de chasser de nombreux cols mais une petite lassitude physique, une météo un peu aléatoire en deuxième semaine, la volonté de passer du temps en famille et une situation logistique un peu contraignante m’ont obligé à faire des choix et à limiter mon temps vélo à seulement 8 sorties. J’ai réalisé au total en vélo de route et VTT, 408 km, 10 500 m de D+ et franchi 6 cols différents. J’ai quelques petits regrets mais j’ai tout de même pu accomplir mes grands objectifs et ils ont été magnifiques : Col du Parpaillon, Col Agnel et Col d’Izoard. Les autres ascensions étaient mineures mais très plaisantes et en accord avec mon désir de découvrir des coins inédits. Je vais vous faire partager toutes mes ascensions dans les pages suivantes :


Col Agnel

Col Agnel – 2744 m, second col le plus haut des Alpes.

Mercredi 21 août 2019

Aujourd’hui, c’est une journée spéciale à deux titres : d’abord, c’est journée balade pour la famille, moi en vélo et ma femme et mes 2 enfants qui vont me rejoindre en voiture pour le pique-nique. C’est une petite tradition à chaque séjour dans les Alpes. Par exemple, en 2017, c’était à l’occasion de mon ascension du Col de l’Iseran. L’autre titre est que je vais grimper le Col Agnel, second col routier le plus haut des Alpes françaises selon les termes présentés sur cette page wikipedia.

Sur les premiers de la liste, les cases sont en partie cochées :

  1. Iseran (2764 m) : 2 fois
  2. Agnel (2744 m ) : à faire
  3. Bonette (2715 m) : 1 fois
  4. Galibier (2645 m) : 3 fois
  5. Izoard (2361 m) : 1 fois et bientôt 2 , deux jours plus tard
  6. Lombarde (2350 m) : à faire
  7. Cayolle (2326 m) : 1 fois
  8. Loze (2304 m) : à faire
  9. Allos (2250 m) : 2 fois
  10. Petit-Saint-Bernard (2188 m) : 1 fois

Pour réaliser cette longue sortie, il m’a fallu jongler avec la météo qui n’a pas été idéale cette semaine. Ce mercredi présentait une des meilleures garanties avec éclaircies annoncées la journée et risques d’orages en fin d’après-midi. Je n’avais aucune envie de me retrouver sous la pluie ou un orage à plus de 2000 m d’altitude et de voir aussi le pique-nique tomber à l’eau !

La logistique n’est pas facile. Depuis Embrun, la route est longue jusqu’au Col Agnel avec près de 68 km… il me faut partir tôt et essayer de tenir l’objectif de se retrouver au Col d’Agnel pour le pique-nique. Cela n’allait pas se passer tout à fait comme prévu…

Départ 8h, j’aurais peut-être dû partir plus tôt… j’ai environ 5 heures pour rallier le Col Agnel distant de 67 km. La plupart diront que ce n’est pas grand chose mais pour ma part, en montagne, c’est beaucoup car elle réserve bien des surprises avec la météo, le relief, la forme du moment etc. De plus, comme je suis assez contemplatif, il faut ajouter les nombreux micro-arrêts pour les photos qui s’ajoutent à mon temps de parcours.

Embrun > Guillestre

À la sortie de la voie d’accès du Camping des Grillons, je prends à gauche la Route de la Madeleine (D340) et celle-ci va me faire déjà dépenser quelques efforts. Un faux-plat descendant puis la petite bosse de la Madeleine me guide au pied d’Embrun juste au niveau du pont qui enjambe la Durance.

Depuis le Pont sur la Durance, je vais ensuite suivre la D994d en direction de St-André-d’Embrun. Je suis sur l’itinéraire partagé appelé « Les balcons de la Durance ». Il a été d’ailleurs emprunté en partie par les participants de l’Embrunman quelques jours plus tôt. Je la connais pour l’avoir parcouru déjà 3 fois (en montée et en descente) lors de mes précédentes sorties. Ça monte doucement dans un premier temps avec 440 m à 3,5% puis la pente commence à se faire déjà bien sentir avec 515 m à 6,5%, voilà de quoi s’échauffer jusqu’au pont qui enjambe le Torrent de Crévoux.

Juste après le pont, la voie part sur la gauche et semble proposer un petit raidard… l’illusion est fausse, il s’agit d’une simple rampe de 375 m à 6% qui me guidera vers une route en balcon. Cette dernière est très plaisante car je vais pouvoir remettre quelques dents sur un faux plat montant de 575 m à 4% et profiter en même temps de belles vues sur la Vallée de la Durance.

Un petit coup de cul – 195 m à 6,5% – suivi d’un nouveau faux plat montant – 540 m à 4% – me mènera jusqu’au croisement avec la D39. J’étais en terrain connu jusque là puisque je l’avais suivie pour grimper le Col de la Coche et le Col du Parpaillon plus tôt lors dans mon séjour. Je continue donc de suivre l’itinéraire partagé des « Balcons de la Durance » sur la D944d. Il faut savoir qu’à cette endroit de la vallée, la rivière de la Durance a creusé un passage assez étroit qui a rendu les voies d’accès assez compliquées pour les cyclistes. En effet, après Embrun, il y a 3 choix possibles :

  1. Suivre sur la droite l’itinéraire partagé des « Balcons de la Durance » en passant par St-André d’Embrun
  2. Suivre au centre la N94
  3. Suivre sur la gauche l’itinéraire partagé des « Balcons de la Durance » en passant par Châteauroux-les-Alpes

Cependant, ces 3 choix présentent plusieurs inconvénients comme celui de devoir grimper car les routes sont construites sur les flancs de la vallée. La N94 est la voie à éviter car la circulation automobile assez intense rendra la progression assez pénible. Le passage par Châteauroux-les-Alpes est assez ardu rendant les efforts plus conséquents. Le passage par St-André d’Embrun est le plus facile, ce que j’allais constater par la suite.

Après Embrun, sommets marquants de la Vallée de la Durance qui font partie du Massif des Écrins.

Ne connaissant pas du tout la suite, je redoutais d’avoir à gravir des petits raidards cachés puis finalement, ça c’est très bien passé avec une succession de faux plats montants et descendants assez roulants entre St-André d’Embrun et St-Clément-sur-Durance. Je quitte donc l’itinéraire partagé des « Balcons de la Durance » pour me retrouver sur la N94 juste après St-Clément-sur-Durance. Depuis mon campement, j’ai roulé 17 km.

J’ai réalisé un bon reportage photo, n’hésitez pas à les regarder en mode diaporama en haute définition !

St-André-d’Embrun sur l’itinéraire partagé des Balcons de la Durance.
On aperçoit Châteauroux-les-Alpes de l’autre côté de la Vallée de la Durance.
Route tranquille avec un éclairage particulier entre ombre et lumière en ce début de matinée…
Joli décor champêtre au niveau de Bon Pommier.

Je dois suivre la N94 sur environ 2 km. Circulation infernale déjà en ce début de matinée. Cela m’a conforté dans l’idée qu’elle est épouvantable pour le cycliste qui aimerait s’y risquer pour remonter la Vallée de la Durance entre Embrun et Briançon ! La seule solution pour être plus en sécurité est d’emprunter au maximum les routes balcons (Embrun > D340 > D944d > D38 > D994e > D4 > N94 > Briançon) qui bordent la vallée mais il faudra prévoir de faire beaucoup d’effort. En faisant une simulation, il faut compter près de 59 km et 1080 m de D+. Imaginez déjà l’énergie dépensée si vous vouliez ensuite enchaîner avec le Col d’Izoard !

Il y a une autre alternative : prendre le train entre Embrun et Briançon. Mais pour avoir tenté le coup au cours de mon séjour pour ma sortie au Col d’Izoard… pas de train le matin, le premier est à 13h03 ! Cette déplorable initiative est à mettre au bénéfice de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur qui, ces derniers temps, a réduit drastiquement les trains pour des raisons soi-disant économiques. Pour compenser ce manque, il y a des navettes bus (qui viennent un peu plus encombrées la N94) mais les vélos ne sont pas pris en charge.

La N94, bien tenir sa droite ! Pas de piste cyclable !

Après avoir serré les fesses durant cette petite partie sur la N94, avec soulagement je bifurque à droite sur la D86a, beaucoup plus calme, en direction d’abord des Isclasses puis de Guillestre. À cette endroit, la Vallée de la Durance s’élargit grandement et forme la Plaine de Barbeing. Cela me permet d’admirer le Mont-Dauphin, formidable place forte construite par Vauban, juchée sur un large plateau rocheux, destinée à verrouiller les accès des Vallées de la Haute Durance et du Guil à la fin du XVIIe siècle.

Un magnifique décor se présente à l’entrée de la Plaine de Barbeing.
Le Mont-Dauphin surveille l’accès à la Vallée du Guil.
Le premier sommet marquant à l’entrée de la Vallée du Guil.

Guillestre > Col de l’Ange Gardien

Il faut fournir quelques effort pour accéder à la Vallée du Guil. Un faux plat montant me guide vers Guillestre suivi d’une rampe plus soutenu vers son centre-ville. Au lieu de contourner Guillestre par la D902a qui n’est pas très plaisante, j’avais décidé de le traverser pour mieux découvrir que c’est assez sympa, ce que je n’avais pas fait lors de mon premier passage en 2005.

Le Mont-Dauphin vu depuis les Isclasses.
Guillestre, c’est un plaisir d’y revenir après 14 ans.
Guillestre.
L’église Notre-Dame-d’Aquilon.

Du centre-ville de Guillestre, je continue de monter un peu plus haut pour me retrouver à la fin du contournement où commence la D902. C’est parfait… jusque là… Je rejoins rapidement l’entrée de la Vallée du Guil qui débute par un lieu extraordinaire : les Gorges du Guil.

J’emprunte la D902 à la sortie de Guillestre.
Panorama vers la Vallée de la Durance / Massif des Écrins.

Seulement, arrivée juste à l’entrée des Gorges du Guil symbolisé par un petit acqueduc appelé le Porteau et qui passe au-dessus de la route, deux panneaux m’interpellent : le premier est une obligation de tourner à droite pour emprunter une piste cyclable, le second juste devant le Porteau est une interdiction pour les vélos ! Voilà un truc qui n’était pas prévu au programme.

Obligation de tourner à droite pour emprunter une piste cyclable.
Interdiction pour les vélos.

Je réfléchis rapidement. Il n’y a pas d’autres cyclistes près de moi me permettant de voir s’ils bravaient l’interdiction. Lors de mon ascension du Col d’Izoard en 2005, je n’étais pas parti tout-à-fait de Guillestre m’étant avancé en voiture jusqu’à la Maison du Roy à la fin des Gorges du Guil donc aucun souvenir de ces panneaux qui je pense ne devaient peut-être pas exister.

Je vais suivre le règlement, cela m’amène à donc emprunter la piste cyclable obligatoire… qui est la Route de la Viste. 

Petit historique (source envie-de-queyras.com) : avant sa construction, il fallait passer par la route dite de la « Viste » (qui permet d’avoir une belle vue sur sur Guillestre et ses environs – d’où son nom) qui se termine côté Maison du Roy via le « Tourniquet » (des virages en colimaçon). Celle-ci, construite comme la route de la Combe du Guil en 1855, part sur la droite à la sortie de Guillestre, avant les caneaux suspendus (le Porteau), et qui s’élève plus en hauteur à travers la forêt (offrant donc un beau panorama sur Guillestre) pour rejoindre la Maison du Roy. Elle permettait aux diligences et premières voitures de rejoindre Château-Queyras, en remplacement d’un chemin muletier qui existait depuis le Moyen-Âge. L’arrivée du train ayant augmenté le traffic routier, l’ancienne route de la Viste a été remplacée par la route des Gorges, afin d’éviter les passages difficiles du Tourniquet notamment.

La Route de la Viste s’élève donc bien au-dessus des Gorges du Guil, évite les tunnels et débouche à la Maison du Roy. Mais au lieu de la douce descente qui y mène, c’est un méchant strapontin qui m’attend avec d’abord une bonne rampe de 885 m avec une déclivité qui atteint les 9%. Puis une légère descente me laisse imaginer que j’en ai terminé avec cet effort imprévu mais il me faud en remettre une petite couche avec 585 m à 6,5%. Enfin, ce sera une belle descente jusqu’à la Maison du Roy mais je dois être prudent, la route est étroite avec des lacets serrés et comporte quelques gravillons. Ce n’est pas aussi scénique que l’itinéraire traditionnel mais il y a 2 points positifs avec de rares mais beaux points de vue et surtout avec l’absence de tous véhicules motorisés puisque c’est une piste cyclable, sauf lorsque la nouvelle route est en réfection/entretien (généralement au mois de septembre) : une circulation alternée est alors mise en oeuvre.

En s’élançant sur la Route de la Viste, on peut distinguer sur sa droite la Station de Risoul 1850, une autre bonne ascension.
Ça grimpe, ce n’est pas large mais l’asphalte est correct et on est tranquille.
Vue sur Guillestre et la Vallée de la Durance depuis la Route de la Viste.
Une éclaircie permet de voir la partie supérieure des Gorges du Guil.
Vue sur les Gorges du Guil depuis la Route de la Viste.
À la fin de la Route de la Viste, on peut apercevoir la D902 en contrebas.
Depuis la Maison du Roy, pas de panneau d’interdiction mais une indication d’itinéraire conseillé…

On peut imaginer que le passage entre le Porteau et la Maison du Roy est toléré car j’ai vu de nombreux cyclistes l’emprunter lorsque je l’ai prise dans l’autre sens lors de ma sortie au Col d’Izoard 2 jours plus tard. Mais la confusion est encore plus grande lorsque l’on veut passer dans l’autre sens, c’est à dire entre la Maison du Roy et le Porteau. Et bien, il n’y a pas de panneau d’interdiction, ni de panneau d’obligation pour les vélos !

S’il vous vient l’envie de passer par la Route de la Viste depuis la Maison du Roy, ce sera dure avec une rampe encore plus difficile : 330 m à 10% suivi de 1240 m à 8% !

Dans tous les cas, que ce soit avant ou après avoir grimpé au Cols d’Izoard ou Agnel, voilà un petit effort supplémentaire à prévoir éventuellement au menu… je parie que beaucoup d’entre vous, auront déjà choisi l’itinéraire traditionnel (D902) qui ne présente aucune difficulté. C’est une légère descente jusqu’à la Maison du Roy. Il faudra tout de même négocier 2 aspects :

  • ne pas être sujet au vertige car la route présente des vues très saisissantes mais magnifiques sur le Guil situé 100 mètres plus bas
  • être très très prudent en traversant les 4 tunnels qui sont assez dangereux car ils sont faiblement éclairés et surtout très étroits. Il faudra se méfier des véhicules !

Pour moi, pas trop de regrets, c’était l’occasion de découvrir une alternative aux Gorges du Guil. Mais, même si je ne le savais pas encore, j’avais forcément grillé une cartouche pour la suite de l’ascension…

Les Gorges du Guil prennent fin à la Maison du Roy, au nom un peu étonnant pour ce joli endroit coincé au milieu des montagnes. Je vais toujours suivre le Guil mais en enchaînant avec la Combe du Queyras (ou Combe du Guil).

La Combe du Queyras n’offre pratiquement aucune difficulté. La route est large et rectiligne, très bien asphaltée. Les vues sur le Guil sont divertissantes. Je traverse un nouveau tunnel, celui du Runevost. Long de 150 m, il est beaucoup mieux éclairé et assez large. Dans la partie finale, un rétrécissement net de la combe où la route affleure d’impressionnantes parois rocheuses est l’occasion de traverser un passage spectaculaire. Peu après, je grimperais la partie la plus difficile de l’ascension avec le Col de l’Ange Gardien. La route se cabre assez vite pour passer à 7,5% sur 535 m puis 2 lacets à 6,5% sur 590 m (présence d’un monument aux morts) me guideront au sommet du col à 1347 m.

La Maison du Roy.
Entrée de la Combe du Queyras.
Aucune difficulté sur une route rectiligne en faux plat montant assez roulant.
Le Tunnel du Ruvenost.
Le Veyer, une des rares constructions présentes au fond de la vallée. Un peu étonnante aussi, une église et un… cimetière.
Le Serre d’Hugues.
Rétrécissement du Grand Clapier, un passage spectaculaire.
Petite prairie avant d’attaquer le Col de l’Ange Gardien.
Rupture de pente à l’attaque du Col de l’Ange Gardien.
Dans les lacets sous le Col de l’Ange Gardien.
Monument aux morts sous le Col de l’Ange Gardien.
Col de l’Ange Gardien – 1347 m.
Oratoire au passage du Col de l’Ange Gardien.

Col de l’Ange Gardien > Ville Vieille

Une fois franchi le Col de l’Ange Gardien, je vais passer à la troisième partie de mon parcours. Lorsque je dépasse le carrefour qui propose l’accès au Col d’Izoard, c’est une route inédite qui s’offre à moi. Pas d’effort avec 1 bon kilomètre légèrement descendant puis la pente s’accentue tranquillement – 650 m à 5% – en direction de Château Queyras que je peux déjà apercevoir. Ce n’est pas un château mais un fort, datant du XIIIe siècle et remanié plus tard par Vauban, construit en haut d’un piton rocheux (un verrou glaciaire) barrant la vallée du Guil. Sa vue est très sympa.

La route fait un bon ressaut pour franchir Château Queyras. Environ 120 m à 8,5% pour franchir à l’occasion Le Collet – 1390 m – référencé par le Club des Cents Cols. Une belle fontaine m’accueille juste après et me permet de me rafraîchir et de refaire les niveaux.

Sortie de la Combe du Queyras, la route bascule vers une vallée plus ouverte.
Le carrefour qui propose d’aller au Col d’Izoard à gauche, je prends tout droit pour aller au Col d’Agnel.
J’aperçois Château Queyras.
Le Fort Queyras barre franchement la Vallée du Guil.
À l’entrée de Château Queyras, courte ascension du Collet.

 

Le Collet – 1390 m.
Vue opposée du Collet – 1390 m.

J’ai une petite faim et j’aimerais bien m’offrir un petit croissant avant d’attaquer l’ascension du Col Agnel. Je descends de l’autre côté de Château Queyras, remonte jusqu’au pied du fort, pas de boulangerie. Ben mince alors. Entre Château Queyras et Ville Vieille, aucune difficulté : 1,7 km sur un faux plat montant très léger. Je trouve enfin une boulangerie à l’entrée de Ville Vieille. Le village n’a pas l’air très ancien comme on pourrait l’imaginer mais il est assez joli.

La rue au pied de Château Qeyras, ne cherchez pas de boulangerie, il faudra aller jusqu’à Vieille Ville.
En direction de Ville Vieille, route facile et bien dégagée.
J’arrive à Vieille Ville, direction à droite pour le Col Agnel.
Un petit coup d’œil en arrière pour distinguer les beaux sommets du Massif du Queyras.

Ville-Vieille > Col Agnel

Je déguste un beau croissant avec plaisir et réalise un point sur le parcours. Près de 46 km depuis Embrun et 930 m de dénivelé positif qui, même s’ils ont été gérés tranquillement, pèseront un peu plus tard… À cet instant, je ne me sens pas fatigué, je pense avoir la fraîcheur suffisante pour attaquer l’une des ascensions les plus difficiles des Alpes : 20,7 km pour 1369 m de D+ à 6,5% de moyenne pour atteindre le second plus haut col routier des Alpes françaises situé à 2744 m d’altitude.

Depuis Ville Vieille, un profil abordable dans ses 2 premiers tiers mais difficile dans son final.

Top départ de l’ascension en franchissant le pont qui enjambe le Guil. Je traverse Ville Vieille – 300 m à 3,5% – et la route amorce une belle courbe à gauche tout en se cabrant déjà durant 1,6 km à 7,5-8%. Je sens tout de suite que je ne suis pas dedans, les jambes sont molles, le rythme pas très franc, bref par expérience, je sais que cette ascension ne va pas se dérouler tout à fait comme je le voulais…

Bon, pas de panique, mon enthousiasme est intact et cette montée inédite remplira sûrement son quota de découvertes. D’ailleurs, ça commence par une belle Demoiselle Coiffée qui se dresse seule sur ma droite entre Ville Vieille et Molines-en-Queyras.

Top départ du Col Agnel.
Ville Vieille.
Dans un lacet au-dessus de Ville Vieille, une belle vue sur des sommets marquants du Massif du Queyras.
Route large entre Ville Vieille et Molines-en-Queyras.
Ne manquez pas la Demoiselle Coiffée sur votre droite !

Je continue de remonter la Vallée de l’Aigue Agnelle. La pente fait relâche sur 800 m à 5,5% mais reprend aussitôt du poil de la bête à 8,5% sur 850 m pour redescendre autour des 7% durant 1150 m jusqu’à la Rua. La route est large et généralement rectiligne, du coup, j’ai l’impression de progresser laborieusement… c’est surtout que la fatigue est déjà là. J’ai chaud, autre signe que la caisse déraille un peu… je bifurque dans la Rua pour pouvoir me refaire une santé en essayant de dénicher une fontaine pour me rafraîchir, chose que j’ai pu accomplir. Le replat de 750 m à 5% me fait un peu du bien.

Une belle barre rocheuse anime l’ascension dans cette première partie jusqu’à Molines-en-Queyras.
Le paysage se découvre à l’approche de Molines-en-Queyras.
La commune de Molines-en-Queyras débute par le hameau de la Rua sur votre droite.
Une fontaine rafraîchissante vous attend à la Rua.
J’aime beaucoup ce type de chalet à l’ancienne.

À la sortie de la Rua, marquée par l’imposante église Saint-Romain, je me retrouve directement au pied de Molines-en-Queyras. On a envie de suivre la route toute plate qui part à St-Véran mais il faut bifurquer à gauche pour traverser Molines-en-Queyras. Une bonne surprise m’accueille méchamment : un court mais bon raidillon pas piqué des vers avec un fumeux 10%. Ouf, ça replate… environ 30 m et hop, deuxième petite vague assassine ! Argh, mes cuisses s’en souviendront !!!

L’église Saint-Romain et son clocher si particulier.
Molines-en-Queyras. On ne le voit pas tout de suite mais un méchant raidillon vous attend…

Heureusement, la suite de la traversée de Molines-en-Queyras se déroule sans encombres. À la sortie du village, j’ai droit à deux autres surprises : ma femme Corinne et mes enfants viennent de me rejoindre et un vent de face a fait son apparition…

Je vais devoir revoir un peu mon programme. Il reste encore 15 km jusqu’au sommet dont le difficile final. Me connaissant et ne semblant pas dans un grand jour, il faudra au moins 1h45 pour terminer l’ascension. Hors de question de faire attendre la famille pour le pique-nique, ce sera donc une interruption de la montée pour le repas.

Depuis Molines-en-Queyras, on distingue la route qui mène St-Véran.
Une très jolie fontaine à la sortie de Molines-en-Queyras.

 

Un très beau lacet à la sortie de Molines-en-Queyras.

Cependant, je poursuis mon chemin car Corinne a continué sa route pour s’arrêter un peu plus loin. La pente reste soutenue jusqu’à Pierre Grosse1,2 km à 7,5% puis 400 m à 6,5% – et le vent de face est bien persistant. Là, ça tourne laborieusement. C’est confirmé, je n’ai pas les jambes aujourd’hui. Finalement, je suis content de faire ce pique-nique pour remettre les batteries à niveau. À Pierre Grosse, je retrouve Corinne et on décide de trouver un coin pour le pique-nique. Je repars entre Pierre Grosse (légère descente à la sortie qui fait du bien) et Fontguillarde où la pente se fait plus douce à 5% durant 1,6 km.

Sur la droite, la Vallée de l’Aigue Blanche.
J’arrive à Pierre Grosse.
À la sortie de Pierre Grosse, la Vallée de l’AIgue Agnelle est large et offre peu de protection quand on est face au vent.
J’arrive à Fontguillarde, dernier hameau avant le sommet.

Corinne a trouvé un coin sympa pour le pique-nique juste à la sortie de Fontgillarde. Finalement, ce sera un bon choix car il y a encore du soleil… On se fait un bon petit repas en écoutant les cris des marmottes tout autour mais sans les voir. Mes jeunes – Emilie et Victor – prennent le bon air de la montagne et mon chien Flush quémande quelques croutons de pain. Environ 40 minutes plus tard, je repars, Corinne montera tranquillement jusqu’au sommet.

La reprise est assez facile avec 1,3 km à 2,5%. Mine de rien, je dépasse à l’occasion les 2000 m d’altitude. La Vallée de l’Aigue Agnelle est assez large et étant assez rectiligne, on ne s’en rend pas compte du tout pour le moment. La pente est encore douce jusqu’au Rocher d’Annibal (un gros caillou échoué sur le bord de la route) avec 3% sur 800 m puis s’accentue légèrement avec 4,5% sur 1,2 km.

Après Fontguillarde, c’est une belle route bucolique sans grande difficulté…

Après avoir dépassé une gargote (planté au milieu d’un étonnant gazon anglais) qui annonce que c’est le dernier point d’eau avant le sommet, le début du final s’annonce au détour d’un léger virage avec un long  ruban d’asphalte dévoilant une nette rupture de pente. L’effet est saisissant : coolitude du coin et effet déprimant à la fois…

Quand vous verrez cette vue, ce sera le début du final et ça va grimper !

La déclivité va tourner à 7% sur 2,2 km. Rien d’insurmontable sur le papier sauf que ce vent de face devient vraiment persistant et ralenti considérablement mon allure sur une route désespérément rectiligne ! Bien que je me suis restauré depuis peu, ma barre d’énergie baisse petit à petit… décidément, c’est vraiment un jour sans, ce qui n’est pas idéal quand il faut grimper le second col routier le plus haut de France ! Enfin bon, je me connais, j’irais jusqu’au sommet coûte que coûte et je prendrais le temps qu’il faudra…

Au détour d’un léger virage, j’ai d’ailleurs mon objectif en ligne de mire. Mais j’aperçois que pas mal de nuages traînent vers le sommet du Col Agnel, ce n’est pas très bon ça…

Le Col Agnel est en ligne de mire mais il y a encore bien du chemin.

La route est désespérément rectiligne au milieu d’une vallée assez large, il n’y a aucun arbre qui offre soit de l’ombre soit un abri contre le vent et la pente mine de rien s’accentue autour des 9% et gardera cette moyenne durent les 5 derniers kilomètres qu’il me restent à faire jusqu’au sommet. Dur !

Quand ça ne va pas bien, et bien il faut profiter du paysage pour se distraire. Il est assez sympa avec les pentes du Grand Queyras (3114 m) sur ma gauche et celles du Pic du Château Renard (2989 m) sur ma droite. Même si les sommets ne sont pas enneigés, c’est de la Haute Montagne mes amis et ça j’adore !

Le route est désespérément rectiligne, la vallée est large et n’offre aucun abri si le vent de face est de la partie.

Le vent fait son travail de sape, il m’affaiblit de minute en minute mais je suis aussi confronté à un problème que je traîne depuis l’an dernier : mon vélo ! Pour mémoire, mon Lapierre qui possédait un triple-plateau (50-39-30 / 13-32) et avec lequel j’ai gravi des centaines de cols m’a lâché en 2018 et j’ai du me rabattre sur l’achat d’un Scott seulement équipé d’un double-plateau (50-34 / 13-32), l’offre technique et commerciale ne proposant aujourd’hui plus que cela. Mais qui a décidé que tous les cyclos pouvaient tirer des braquets minimalistes en montagne ?!!! Ben pour moi, ça me convient difficilement car je ne suis qu’un bon vieux diesel qui tire très moyen. Avec ce nouveau vélo, ça passe mais je suis toujours à la limite, je n’ai pas de marge et dans un jour sans comme aujourd’hui, et bien c’est un boulet ! À l’heure où j’écris ces lignes, j’ai enfin réglé ce problème car j’ai pu retrouver un vélo équipé d’un triple-plateau (Colnago 50-40-28 / 13-29) et avec une structure tout carbone en bonus, il me permettra de me projeter plus facilement dans mes futurs séjours en montagne.

J’avais retenu que les derniers kilomètres étaient constitués de lacets… voilà enfin le premier ! Je l’attendais avec impatience car il allait permettre de varier enfin cette ascension qui commençait à être monotone avec ce long bout droit interminable depuis Molines-en-Queyras.

Le lacet parait effrayant avec la vue de la pente mais ce bon vent de face passant donc dans le dos me le fait gravir sans effort ! On change aussi de point de vue qui est magnifique car il donne sur les sommets du Massif des Écrins bien visibles avec ses glaciers culminants à près de 4000 m d’altitude.

La route va enfin aborder le premier lacet du final.
Un lacet costaud mais avec le vent dans le dos, ça passe tout seul.
Et on change enfin de point de vue. Et quel point de vue avec quelques beaux sommets du Massif des Écrins.
À l’attaque du lacet suivant, on aperçoit bien Le Grand Queyras (3114 m).
Le Col Agnel est plus proche désormais.

Je poursuis mon chemin. Désormais, j’ai bien en vue le sommet du Col Agnel. Il est bien visible placé au bout les sommets d’un noir minéral de la Pointe des Sagnes Longues qui se profile sur ma droite. Le ciel se couvre, le soleil se fait plus timide et l’air est bien plus frais. C’est normal, je suis dans la zone des 2500 m d’altitude.

Le Col Agnel est attaqué par de nombreux nuages…
Nouveau lacet à 2500 m d’altitude. La vue sur le Massif des Écrins est encore plus nette.

Bon, j’avoue que c’est dur, les jambes lourdes, le souffle court… je grimpe au mental désormais. En passant à proximité du Refuge Agnel (il y a aussi le Refuge Napoléon mais on l’aperçoit difficilement car il se trouve un peu plus haut et est en ruine), le panneau annonçant les 2 derniers kilomètres me redonne un petit regain d’énergie. Les lacets, désormais plus nombreux et plus courts me permettent finalement de bien finir.

J’approche du Refuge Agnel.
Passage près du Refuge Agnel et il ne reste plus que 2 kilomètres…
La pente est à 9%… à près de 2600 m d’altitude, le souffle est court !

En passant dans les lacets sous le Col Agnel, j’aperçois au sommet mes enfants et mon épouse qui m’attendent patiemment depuis un moment. Cela me redonne du courage et je pense à eux car il ne fait plus très chaud et les nuages poussés par un bon vent apportent une atmosphère presque lugubre au lieu.

Un dernier virage, quelques hectomètres encore et ça y est, je franchis enfin le Col Agnel à 2744 m d’altitude sous les encouragements de la famille. Délivrance car je n’étais vraiment pas dans un bon jour mais avec une belle satisfaction d’avoir gravi le deuxième plus haut col routier des Alpes françaises (derrière celui de l’Iseran), et le troisième de toutes les Alpes (derrière le col de l’Iseran et le Passo dello Stelvio). C’est aussi une case enfin cochée sur ma To Do List des 10 plus hauts cols alpins français (il me reste les Cols de la Lombarde et de la Loze).

Les derniers lacets passent sous le col.
Je me retrouve à moitié dans les nuages !
Les derniers mètres…
Col Agnel – 2744 m, second col le plus haut des Alpes.
C’est aussi la frontière entre la France et Italie.

Je me couvre bien car j’ai bien transpiré dans cette ascension et ce n’est pas le moment d’attraper un coup de froid pour tomber malade avant la fin du séjour. On fait les photos-souvenirs d’usage et comme tout est couvert par les nuages, on ne s’attarde pas. J’ai eu le temps de découvrir que le Col Agnel ressemblait beaucoup à celui du Galibier avec une plate-forme assez petite et son court lacet passant rapidement de par et d’autre de chaque côté d’une arrête montagneuse. Celle-ci se prolonge jusqu’au Pain de Sucre que je ne verrais malheureusement pas ainsi que le Mont Viso. Je suis un peu déçu et mes photos seront assez moyennes. Vu le mauvais temps au sommet, on abandonne aussi le projet de descendre du côté italien jusqu’au Lac de Castello. C’est très dommage, j’aurais bien voulu reconnaître une partie de ce versant qui est encore plus redoutable que le versant français ! Je l’aurais descendu à vélo mais pas remonter, je n’en aurais pas eu la force et c’était impossible de faire attendre autant ma famille !

Colle delle’Agnello : appellation italienne du Col Agnel.
Photo souvenir avec mes enfants et mon chien.
Photo souvenir avec mon épouse.
Un aperçu du final du versant italien… dans les nuages !
Une autre photo prise un peu plus tôt par mon épouse avec moins de nuages.
Une sculpture italienne célébrant le passage du Giro.
Panorama sur les derniers lacets du versant français.

Allez, je m’offre un cadeau en me lançant dans les 20 kilomètres de descente jusqu’à Ville Vieille. Ce sera bien assez pour aujourd’hui avec des chiffres assez conséquents pour mon niveau : 90 km, 6 heures de selle et 2300 m de dénivelé !

Pour conclure, cette sortie m’a beaucoup fatiguée pour la fin du séjour. Même si le temps n’a pas été très favorable sur la fin de la semaine, je n’ai pas eu la motivation d’enchaîner avec une ascension intermédiaire (j’aurais aimé faire celle de Risoul) et il fallait que je réserve mes dernières forces pour le dernier objectif majeur de mon séjour : le Col d’Izoard depuis Briançon.